L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré

Rédigé le 03/11/2024


« L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue »
Luc 4,18

Pendant ces quatre jours nous avons pu faire l’expérience des dons du Saint-Esprit. Si l’Esprit nous choisit, c’est pour partager la joie de l’Evangile. Cette joie ne peut se contenir à un petit groupe d’initiés, c’est notre devoir de l’annoncer au plus grand nombre.
« Évangéliser c’est avant tout se tourner vers quelqu’un »
Fabrice Hadjaj

Parler de quelqu’un avant de parler de quelque chose

Nous sommes la religion de l’Incarnation. Se tourner vers le Christ, c’est d’abord se tourner vers quelqu’un ; adhérer à un parti, c’est adhérer à quelque chose. Quelque chose, une doctrine, un message, on peut le comprendre : cela peut tenir dans ma tête, cela peut se coucher (comme ici) sur du papier. Mais on ne peut jamais comprendre entièrement quelqu’un, même si ce n’est qu’une personne. La vie conjugale en fournit une preuve expérimentale (c’est pourquoi la Bible recourt souvent à cette image) : l’époux a beau l’embrasser, il ne comprendra jamais entièrement l’épouse. Mais la preuve se trouve aussi dans la vie parentale : le fils échappe au père, au moins autant que le père échappe au fils. À tel point que ce qui est parfois un dialogue de sourd au plan des idées, n’en demeure pas moins une relation profonde entre les personnes.

Dès lors, la parole chrétienne ne consiste pas d’abord à dire quelque chose sur quelque chose, mais à dire de quelqu’un à quelqu’un. C’est appeler et être appelé, par son nom propre, avant d’expliquer où d’imposer, avec des noms communs. C’est un vocatif avant d’être un accusatif. C’est un « Suis-moi », avant d’être un « Voilà ce que tu es », ou un « Voilà ce que l’on doit faire ». La loi est nécessaire, évidemment. Mais elle n’est pas suffisante, elle n’est pas première, parce qu’elle est impersonnelle, alors que l’appel est personnel. On peut déjà en déduire que l’évangélisation ne relève pas d’abord de la communication, mais de la communion. On communique quelque chose, mais on communie avec quelqu’un.

Le Christ n’est pas une marque dont on fait la publicité. II est une personne qui vient à notre rencontre, avec tout l’inattendu, tout l’incontrôlable que la rencontre implique. Si le Christ est venu enseigner les pécheurs, il s’est avant tout assis à table avec eux.

L’évangélisation, oeuvre de fraternité

Notre Foi est missionnaire en elle-même : en nous tournant vers Jésus, elle nous tourne nécessairement vers tous les autres. Imaginez que vous ayez à faire l’éloge de Michel-Ange en tant que sculpteur. Il vous faudra, pour cela, faire aussi, et même d’abord, l’éloge de ses statues. Quand vous vous tournez vers un artiste en tant qu’artiste, vous êtes bien obligés de vous tourner du même coup vers ses oeuvres d’art. Quand vous vous tournez vers Dieu en tant que Créateur, vous êtes obligés de vous tourner du même coup vers les créatures. Et quand vous vous tournez vers Dieu en tant que Rédempteur, vous êtes obligés de vous tourner du même coup vers les pécheurs. Et, dans ce dernier cas, ce n’est pas seulement aux belles statues qu’on doit s’intéresser, c’est aussi et surtout aux blocs mal dégrossis, aux tas de cailloux, aux sables mouvants…

La mission n’est pas l’application d’une science ni la progression d’une secte. Ce qui est extérieur à la secte lui est extérieur, et il s’agit soit de l’ignorer, soit de l’éliminer, soit de l’absorber. Ce qui est extérieur à l’Église lui est encore intérieur, parce que ce qui est extérieur à l’Église est encore créé par la tête de l’Eglise elle-même, Dieu. L’athée est encore une parole de Dieu, non par ce qu’il prétend, mais par ce qu’il est ; le frère musulman est encore un frère du Christ, non par ce qu’il croit, mais par ce que croit le chrétien.

Toute expansion pour l’Eglise est donc d’abord une écoute. Non pas une écoute psychologique, à la manière des assistantes sociales, ou des mauvais Samaritains qui, au lieu de chercher les blessures et de les soigner, se contentent de les flatter et de bavarder dessus. II s’agit d’écouter le Christ déjà à l’oeuvre dans n’importe quelle vie (Dès lors que cette vie est, elle n’est plus n’importe laquelle), avec un style et un degré d’articulation différents selon les cultures. Là où le parti s’étend par annexion, l’Eglise se développe par accueil d’un mystère qui toujours la précède. Là où le propagandiste du parti s’impose par conquête, le missionnaire de Dieu s’expose par contemplation : il cherche le Sauveur déjà présent à l’extérieur, dans l’étranger, dans l’indifférent, mais de manière cachée, et qui demande à être discerné et porté à la taille du Christ dans sa plénitude (Ep 4, 13).

La joie de l’Evangile, c’est la joie d’une fraternité déjà donnée, et qui est donc à dégager, à vivre, à révéler à soi-même et à ceux qui ne la reconnaissent pas encore. Même le persécuteur est déjà un allié. Même le bourreau est déjà un frère. C’est cela qui rend leur violence si affreuse et si absurde. Et c’est aussi cela qui fait que leur persécution n’est jamais un obstacle, mais le lieu même du témoignage, de la manifestation d’un amour qui est plus fort que la haine et plus vaste que le monde.

Au moment du baiser perfide, Jésus dit cette dernière parole à Judas : « Mon ami, fais ta besogne » (Mt 26, 50). Pour témoigner de la grâce qui surabonde ou le péché abonde, il faut pouvoir encore dire ami au traître. Lui rappeler qu’il est réellement un ami par les profondeurs de son âme, et que s’il n’est plus que traître, alors il se coupe de ces profondeurs, il se condamne à l’enfer de n’être plus qu’une surface errante en conflit avec son propre coeur.

Par-delà l’optimisme et le pessimisme : l’aubaine d’être né en ce temps

Cette alliance plus forte que tout affrontement nous oblige à reconnaître une providence du fait d’être né dans ce temps et non pas dans un autre. L’adhésion à un parti qui veut changer le monde est toujours soit nostalgique soit utopique. 

Il s’agit de s’exalter dans l’optimisme, avec le progrès du monde de demain, ou de s’étaler dans le pessimisme, avec le regret du monde d’hier. Mais, en vérité, cela va toujours mieux et toujours plus mal, simultanément. La parabole du bon grain et de l’ivraie nous apprend que tout se développe à la fois vers le meilleur et vers le
pire, et que, au nom de l’utopie ou de la nostalgie, vouloir extirper tout le mal ne peut qu’aboutir à arracher le bon grain avec, car ce serait vouloir abolir la liberté.

La foi en Dieu implique la foi en l’aubaine d’être né dans un tel siècle et au milieu d’une telle perdition. Elle commande une espérance qui dépasse toute nostalgie et toute utopie. Nous sommes là, c’est donc que le Créateur nous veut là. Nous sommes en un temps de misère, c’est donc le temps béni pour la miséricorde. Il faut tenir notre poste et être certains que nous ne pouvions pas mieux tomber. Il faut, non pas nous en remettre au futur ni regretter le passé, mais servir la présence de Dieu en toutes choses, dégager l’Eternel dans le temporel, vivre sur la terre la charité qui est déjà – aunque es de noche, bien que ce soit dans la nuit — celle du ciel.

Questions :
• L’évangélisation, c’est quoi pour moi ?
• Est-ce que je cherche à être témoin auprès de ma famille, de mes amis, de mes camarades de classe, d’université ou de travail ? Comment ?
• Quelle personne m’a évangélisé jusqu’à aujourd’hui, m’a apporté l’Evangile, m’a appelé à suivre le Christ ?

Résolution :
Aujourd’hui, Je rentre dans ma maison. Mais ai-je songé que pour avoir accès à la route, il faut commencer par sortir de ma maison et de moi-même. Alors, aujourd'hui, je pars sur la route pour évangéliser tous ceux que je rencontres !

Pour aller plus loin : L’évangélisation à la route

La route est intrinsèquement missionnaire. Que ce soit au moyen d’une veillée à laquelle on a convié les habitants, ou lors d’un créneau dédié pendant la journée sur la place d’un village, la recette est simple. On chante pour témoigner de la joie de l’Evangile qui nous anime, on échange avec les gens pour les écouter, et on les invite à venir prier dans l’église. Nous ne sommes que les instruments, c’est le Seigneur qui agit et qui touche les coeurs. Cette heure route peut être l’occasion pour les plus anciens du clan de partager leur expérience d’évangélisation en route d’été, et de préparer les prochaines missions du clan !